Intersyndicale des orthophonistes

Dossier de l’intersyndicale des orthophonistes pour la rencontre ministérielle du 14 avril 2022

 

Comme nous vous l’écrivions dans un courrier daté du 21 février 2022, nous avons été interpellés par la publication du rapport de l’IGAS intitulé “Trajectoires pour de nouveaux partages de compétences entre professionnels de santé” ainsi que par la parution de lois et de décrets concernant à terme les orthophonistes.

Nous tenons à rappeler plusieurs éléments essentiels concernant la profession d’orthophoniste :

Depuis 2013, les orthophonistes ont une qualification de niveau bac+5. Il s’agit d’un diplôme unique pour tous, donnant l’accès à un métier généraliste, plein et entier. Le Code de la Santé Publique souligne ainsi l’autonomie concernant le diagnostic orthophonique, l’expertise du professionnel de même que le libre choix de ses outils.

Ainsi, nous nous inquiétons de la loi Rist et de ses futures applications (cf. dernier rapport IGAS) instaurant des professions médicales intermédiaires ou des modalités de pratique avancée qui impliqueraient deux niveaux de qualification différents. Cela n’est pas le cas pour l’orthophonie, dont la formation doit rester protégée, car spécifique.

Les mutualisations de formations en projet dans plusieurs universités ou les licences santé nous semblent donc porter atteinte à la spécificité de notre métier et à la qualité de la formation des étudiants, déjà bien malmenée (décret n° 2020-553 du 11 mai 2020, arrêté du 9 septembre 2021).

Tout ceci nous amène à redire que la reconnaissance de l’expertise et de l’autonomie des orthophonistes implique une nécessaire revalorisation salariale. L’Intersyndicale des orthophonistes ne cesse de le revendiquer depuis des années, preuve en est le nombre de communiqués de presse et de rendez-vous sollicités avec les Ministères de la Santé et de la Fonction Publique (cf. fichiers joints). Les compléments de traitement indiciaire instaurés avec le Ségur de la Santé en juillet 2020 en attendant la parution de nouvelles grilles salariales n’ont fait qu’accentuer l’incompréhension et la défiance des professionnels face à tant d’iniquité quant à leur mise en place, en introduisant un traitement différencié selon la profession et le statut et créant des tensions au sein des équipes pluridisciplinaires, notamment dans les établissements médico-sociaux.

Le Ségur est insuffisant et trompeur. Il ne répond pas à la revendication initiale des orthophonistes qui est d’avoir une véritable revalorisation salariale.

Les négociations conventionnelles pour le médico-social introduisent le même chantage avec la promesse de revalorisations salariales contre une attaque de l’organisation du temps de travail et des modalités de recrutement. Nous réaffirmons l’importance de la qualification professionnelle et du diplôme et dénonçons le recrutement par compétences. De même, l’évolution de carrière doit continuer à se faire selon l’ancienneté, pas selon des compétences ou des formations supplémentaires, qui induisent une concurrence entre les professionnels. Nous demandons que tous les orthophonistes souhaitant être titularisés au sein de la FPH puissent l’être et que tous les orthophonistes souhaitant obtenir un CDI dans le médico-social puissent en bénéficier.

Pour des soins de qualité et pour tous, il faut des équipes au complet, des postes en quantité suffisante et effectivement pourvus, une organisation du soin qui fonctionne avec des institutions et des professionnels qui travaillent de façon coordonnée et cependant autonome.

Nous dénonçons la casse des institutions qui s’opère avec l’introduction d’un management destructeur, ne correspondant pas à l’autonomie et au niveau d’expertise de notre profession (des injonctions portées par des cadres administratifs se substituent aux prescriptions médicales). C’est bien un manque de moyens humains qui fait entrave à la qualité des soins et réduit la capacité de réponse aux demandes de soin, pas un problème d’organisation ou de méthode thérapeutique.

On constate ainsi une transformation insidieuse des institutions médico-sociales qui ne peuvent plus soigner et doivent désormais trier les patients selon les orientations définies par les ARS avec la mise en place de plateformes, engendrant une perte du sens du travail pour les professionnels. Les dispositifs proposés pour pallier ces difficultés (le manque de professionnels et l’insuffisance pour répondre à toutes les demandes de soin dans les institutions) misent sur une répartition des rôles entre des institutions qui évaluent et coordonnent, et des libéraux qui traitent. Or, ce que le public et le médico-social ne peuvent pas faire, le libéral ne peut l’absorber.

Le constat est alarmant et les conséquences désastreuses, non pas seulement pour les patients mais également pour les étudiants en orthophonie qui peinent à trouver des lieux de stage en institution, ce qui impacte la qualité de leur formation et leur futur choix de mode d’exercice.

En effet, les néo-diplômés privilégient le mode d’exercice libéral. La synthèse des néo- diplômés 2021 de la FNEO constate que seuls 15% des jeunes professionnels s’orientent vers une activité salariée, privilégiant l’exercice libéral pour des raisons financières.

De plus, les stages couvrent près de 29% du temps de formation au cycle 1 et 51% au cycle 2. Ils sont essentiels car ils établissent un lien constant entre les apprentissages théoriques et la réalité du terrain. 23,3% des néo-diplômés bénéficient d’une offre d’emploi grâce à leurs stages. Permettre aux étudiants d’être mobiles, sans qu’ils aient à se soucier de leurs frais de transport, permettrait d’ouvrir l’accès aux lieux de stages isolés et d’encourager les néo-diplômés à s’y installer. L’indemnisation des frais de stage pour les étudiants en orthophonie est donc primordiale. Selon l’Article L4381-1 du code de la santé publique :

« Les stagiaires (auxiliaires médicaux) peuvent bénéficier de l’indemnisation de contraintes liées à l’accomplissement de leurs stages, à l’exclusion de toute autre rémunération ou gratification ».

Mais, à ce jour, aucun cadre légal précis n’encadre des indemnisations de stage.

Pour faire face et enrayer de façon définitive la pénurie, nous demandons des réponses sur les points suivants :

  • la reconnaissance de l’expertise et de l’autonomie des orthophonistes,
  • le maintien d’une formation généraliste pour les orthophonistes et spécifique à notre profession,
  • une véritable revalorisation salariale, dans la Fonction Publique Hospitalière comme dans les institutions médico-sociales, parallèlement à un réel dégel du point d’indice,
  • une évolution de carrière selon l’ancienneté,
  • l’embauche sous statut ou convention : la titularisation immédiate dans la Fonction Publique Hospitalière ou l’embauche sous CDI dans le médico-social de tous les orthophonistes qui le souhaitent,
  • des équipes au complet, des postes en quantité suffisante et effectivement pourvus,
  • l’arrêt de la destruction des institutions soignantes par la mise en place de plateformes inefficaces,
  • donner un égal accès au soin à tous et sur tout le territoire,
  • favoriser l’embauche des néo-diplômés dans les institutions sanitaires et médico- sociales en indemnisant les frais de stage lors de la formation initiale.

    Nous joignons à cette lettre des documents permettant de comprendre plus en détails les positions de l’Intersyndicale des orthophonistes : chronologie des actions intersyndicales depuis 2013 ; communiqués de presse intersyndicaux ; tribune parue dans Le Monde en janvier 2017 « Quand l’orthophonie quitte l’hôpital » ; synthèse de l’enquête nationale autour des frais engagés pour les stages par les étudiants en orthophonie 2019 ; synthèse des néo- diplômés FNEO 2021.

    2017-05 Article le monde 11 janvier 2017
    CDP intersyndicale ortho 2015-recueil
    CDP intersyndicale ortho 2016-recueil
    CDP intersyndicale ortho 2017-recueil
    CDP intersyndicale ortho 2018-recueil
    CDP intersyndicale ortho 2020-recueil
    CDP intersyndicale ortho 2021-recueil
    dossier intersyndical ortho_RV ministere 14avril2022
    Synthèse-2019-IFDS
    Synthese-neo-diplomes-2021-2

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Publié le :
21 avril 2022

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